Même pas peur
J'avançais pieds nus sur cette plage déserte. Le vent giflait mes joues et le sable humide collait davantage à mes talons à mesure que j'avançait.
L'air était gris, presque menaçant.
Alors que je retire une mèche de cheveux venue devant mes yeux, j'aperçois un homme.
Grimé en Charlot, il plante une à une des roses dans le sable.
Il me lance un sourire que je lui rends et approuve de la tête comme s'il avait deviné mes intentions.
J'approche alors, il m'offre une fleur que je dépose dans ma bouteille en évitant soigneusement de me piquer avec une épine.
Sans un mot, je place délicatement le bouchon et avance près de l'eau en faisant fuir une nuée de mouettes.
Je m’agenouille, pour une fois, je n'ai aucune envie de lancer cette bouteille de toutes mes forces. Je la pose d'une main légère au bord d'une vague.
La mer l'enveloppe alors, et je la suis des yeux un instant, jusqu'à la perdre dans l'écume blanche.
Je n'ai glissé dedans aucune lettre, ni SOS. Simplement de l'amour, un effluve d'amour sincère à donner.
Je fais demi-tour, aide mon inconnu à planter quelques roses dans un silence poétique, puis je rentre.
Comme guidée par le vent, la bouteille est arrivée à tes pieds. Tu as retiré le bouchon avec toute la douceur qui te caractérise.
J'en avais pourtant tant lancé, des lettres au vent. Comme par un heureux hasard, un souffle les a déposées devant toi.
Et alors, tu m'as laissée venir à toi. Tu m'as prise toute entière,telle que je suis. La rose avec ses épines. Toi, tu as osé et tu as su lire et comprendre entre les lignes.
Toi tu sais. Toi seul tu le sais. Tu as pris tout ce que je pouvais t’offrir. Patiemment. Adorablement. Tu m’as prise avec mes joies, mes peines, mes casseroles, mes blessures. Tu as accepté mes maladresses, mes doutes, mes hésitations. Tu m’as offert ce qu’il
y a de plus beau. Toi. Toi sans filtre. Toi au naturel. Pas de séduction. On est ce qu’on est et on l’accepte. Et on l’aime. Tu m’as appréciée pour moi, ce que je suis moi. A nue.
Ça doit être ça l'âme sœur. Quand deux esprits s'imbriquent pour former un tout entier. Ce n'est pas une histoire de compatibilité, c'est bien plus puissant. Toi et moi, on se complète.
La nature a réunit tellement de forces pour que l'on se rejoigne, que nos existences s'en trouvent liées, comme attachées par un fil invisible.
Tu sais, j'ai envie de toi. Pas comme tu l'entends. J'ai envie de rire avec toi, de jouer avec toi, de faire l'amour avec toi, de dormir avec toi.
Tu sais pourquoi toi et moi ça ne peut mourir ? Parce que c’était destiné. La vie nous a mis en face de manière (in)volontaire. Alors que l’on habite à
des centaines de kilomètres l’un de l’autre. Pourquoi à ton avis ? Parce qu’elle sait ce qu’elle fait. Il y a quelque chose à creuser là-dessous, une connexion qui doit s’effectuer. Entre toi et moi. Pour t’apporter quelque chose et pour m’apporter quelque
chose. On pourra tenter de se fuir autant qu’on veut, nos destins se doivent de se croiser. On ne peut mettre de la distance. La vie nous rapproche toujours. Laisse faire la vie, la route. T’étais là, mon corps le sentait. Il savait. On va se retrouver tu
sais. C’est écrit. Prédestiné. On sera nous. Nous, pour toujours. Laissons-faire la vie, laissons-nous guider.
J'ai pris un aller simple pour le bonheur, sans me soucier du retour.